vendredi 30 août 2013

Fleur de tonnerre, Jean Teulé




C’était au temps où l’esprit des Lumières et le catéchisme n’avaient pas soumis l’imaginaire populaire aux lois de la raison et du Dieu unique. Partout en Bretagne, dans les forêts et les landes, sur les dunes fouettées par les vents fous de l’Atlantique, couraient les légendes les plus extravagantes. Le soir, au creux des fermes, on évoquait inlassablement les manigances des êtres surnaturels qu’on savait responsables de la misère et des maux qui frappaient sans relâche. De tous, l’Ankou, l’ouvrier de la mort, était le plus craint, et c’est cette terrible image qui frappa avec une violence inouïe l’esprit de la petite Hélène Jégado. Blottie contre le granit glacé des gigantesques menhirs, l’enfant minuscule se persuada qu’elle était l’incarnation de l’Ankou. Elle devait donc tuer tous ceux qui se trouveraient sur sa route et remplit sa mission avec une détermination et un sang-froid qui glacent le sang. Après avoir empoisonné sa propre mère qui l’avait surnommée « Fleur de tonnerre », elle sillonna la Bretagne, éliminant sans la moindre hésitation tous ceux qui accueillaient avec bonheur cette cuisinière si parfaite. 

Hélène Jégado reste la plus grande « serial killer » de France et, sans doute, du monde entier.

Quels secrets renfermait cette tête qui, le 26 février 1852, sur le Champ de mars de Rennes, roula dans la corbeille de la guillotine ?

Wik, Wik, Wik… Entendez-vous le bruit de l’Ankou qui approche ? Wik, Wik, Wik… C’est le bruit des essieux de son charriot… Wik, Wik, Wik, sa silhouette noire apparaît… Ou plutôt, sont-ce ces longs cheveux blonds ? Hélène Jégado a la beauté du diable…

Cette Hélène de Troie qui, armée du don de sa cuisine, est entrée dans les maisons pour y semer la mort, je l’ai aimée…

Jean Teulé dresse un portrait assez terrible de cette femme, qui s’étiolait si elle n’ôtait pas la vie, mais qui n’était pas pour autant complètement dénuée de sentiments, faisant preuve d’une grande compassion alors qu’elle accompagnait ses victimes dans leur dernier voyage (facile me direz-vous, c’était elle la responsable), et étant même capable d’aimer. Paradoxalement, j’ai aimé cette femme à la logique implacable. Ouvrière de la mort, elle ne faisait que ce pour quoi, selon elle, elle était née, et ce sera jusqu’au bout sa ligne de conduite.

L’auteur nous plonge au cœur de cette Bretagne du 19è siècle, qui se demande encore « C’est où la France ? », et d’où suinte une identité tellement forte qu’elle va même imprégner les personnages secondaires des perruquiers qui font des apparitions régulières, et qui deviendront plus Bretons que les Bretons eux-mêmes. Ces mêmes perruquiers apportent avec leurs représentations imagées dignes du théâtre de Guignol, la touche d’humour nécessaire qui m’a permis de reprendre mon souffle lors de ma lecture.  La fracture France/ Bretagne est réelle, deux univers s’opposent, celui en route vers la « modernité », et celui qui vit encore dans ses croyances populaires. 

Je comprends que le langage, souvent cru, utilisé par l’auteur puisse choquer, mais paradoxalement, je ne m’en suis pas trouvée offusquée. Chaque mot utilisé est à sa place, rien n’est laissé au hasard. Fleur de Tonnerre est un roman incisif, agressif parfois, dans lequel le présent de narration, accompagné de phrases courtes, nous entraîne dans un rythme effréné similaire à celui qui entraîna Hélène lors de son périple qui dura toute sa vie.

Jean Teulé, comme à son habitude dans ses derniers romans, s’est  penché sur un épisode, plutôt insignifiant de prime abord, de l’histoire de France pour interroger le genre humain. Non seulement il s’interroge sur Fleur de Tonnerre, mais également, à travers leur attitude, sur ceux qui la jugeront.

Jubilatoire !

jeudi 29 août 2013

Les sœurs Charbrey, "Sans orgueil ni préjugé", tome 1, Cassandra O’Donnell



 Le mariage ? Morgana Charbrev ne veut pas en entendre parler ! Sa passion dévorante pour les sciences emplit suffisamment sa vie sans qu'elle ait besoin de s'encombrer d'un époux. Cette soif d'indépendance, elle la dissimule derrière une prétendue maladie qui la contraint à rester recluse chez elle, à l'abri des regards courroucés de la haute société. En accompagnant sa jeune sœur Rosalie faire ses débuts à Londres, Morgana était loin d'imaginer que sa beauté et son caractère emporté attireraient l'attention de l'insupportable et ô combien séduisant comte Greenwald.

Contrairement à beaucoup de lecteurs sur la toile, je ne connaissais pas Cassandra O’Donnell avant d’ouvrir le premier tome des sœurs Charbrey (et non, je ne vis pas dans une yourte isolée du monde, je vous vois déjà vous moquant de moi!!) . Elle est pourtant célèbre pour sa saga Fantasy Rebecca Kean, que je n’ai pas achetée, lassée sans doute par le genre (mais entre-temps,  Rose Morte est passée par là, me redonnant goût aux créatures de la nuit !).

En parcourant la blogosphère, je suis tombée sur une chronique d’Anne-Sophie qui m’a donné envie de la découvrir, car c’est aussi çà la blogosphère, transformer un plaisir qui pourrait être solitaire –la lecture-, en un échange, un partage, de belles rencontres livresques et humaines en fin de compte. Au fil de mes périples sur la toile, j’ai découvert que d’autres chroniques lui faisaient écho, et que tout le monde semblait unanime, donc pourquoi pas ? 

Tout ceci accentué évidemment par le clin d’œil à Jane Austen dans le titre. Vous savez combien j’aime Jane Austen…Il n’en fallait pas plus pour déchaîner ma curiosité.

Me voilà donc marchant –ou lisant- à la rencontre de Mme O’Donnell, et de ses personnages, Morgana, femme au caractère bien trempé qui refuse le mariage pour pouvoir continuer à exister et ne pas vivre dans l’ombre d’un homme, et le comte Malcolm Greenwald , ah.. Malcolm, l’éditeur qui refuse de publier une femme (serait-ce-là un clin d’œil à Jane Austen ?) mais qui tombe sous le charme de notre demoiselle, et est bien décidé à la faire changer d’avis.

La trame est cousue de fil blanc me direz-vous…Oui, c’est sûr, rien de bien original dans tout cela, c’est une romance des plus classiques. 

Et qu’en est-il du contexte historique que l’on met souvent en avant pour justifier l’engouement pour ce type de romance ? Il est juste esquissé et, certes, un peu trop absent pour moi qui aime remonter le temps, mais ce n’est pas grave,  l’alchimie se fait malgré tout. 

La plume de Cassandra O’Donnell est vive, ses personnages ne manquent pas de répartie, - les échanges entre Morgana et Malcom sont succulents -, les personnages secondaires bien construits, et certaines situations, bien que prévisibles, ne manquent pas de piquant : un ensemble cohérent pour un ouvrage sans autre prétention que celle de divertir. 

Il est vrai que j’aurais aimé que l’auteure nous détaille un peu plus certaines choses, approfondisse certaines situations qui m'ont semblé se dérouler à une vitesse vertigineuse, que finalement, tout ne paraisse pas si évident, mais après coup, ce n’est finalement qu’un détail…

Sans être un coup de cœur, je lirai avec grand plaisir le tome 2, et vais maintenant me pencher sur la saga Rebecca Kean de cette auteure française – pour une fois qu’une française s’essaye à la Fantasy et à la romance… Et avec succès !

lundi 26 août 2013

Orgueil et Préjugé, (Jane Austen)



Dans un petit village de l'Angleterre sous George III, Mrs. Bennet veut marier ses cinq filles (Jane, Elizabeth, Mary, Kitty et Lydia) afin de leur assurer un bel avenir. Lorsqu'un riche rentier arrive à Netherfield Park, elle espère vivement que ses filles sauront lui plaire, et qu'elle pourra marier l'une d'entre elles au nouveau venu. Malheureusement, ce rentier, Mr Bingley, est accompagné d'un très bon ami, Mr. Darcy,  qui, s'il est très riche, n'est pas un modèle d'amabilité envers la famille Bennet, et les autres voisins. 

Vous le savez déjà, je suis une midinette, et comme toute midinette qui se respecte, j’aime les histoires d’amour, et les histoires d’amour qui finissent bien.

Lorsque la vie me donne des coups, j’ai tendance à me réfugier dans la littérature sentimentale, je lis 3 ou 4 romans à la suite, et je me sens ensuite requinquée, parée pour voguer vers d’autres lectures.

Le problème avec les romans d’amour, c’est que c’est souvent la roulette russe pour peu qu’on soit un lecteur un peu exigeant. Et c’est ainsi que j’ai subi ces derniers temps quelques déceptions : Leçons de libertinage ne m’a pas convaincue, Duel Ardent –encore pire, Leçons de libertinage après la lecture de celui-ci me semblait désormais bien mieux-, bref, des lectures qui n’ont pas rempli leur rôle, et qui m’ont laissé en plus un goût amer dans la bouche, celui d’avoir perdu mon temps.

C’est naturellement que je suis retournée, comme le je fais souvent, vers mon vieil ami, celui sur lequel je peux toujours compter, qui ne me faillit jamais,  Orgueil et Préjugé de Jane Austen.

C’est mon livre de chevet, celui que je lis et relis sans me lasser, en savourant avec le même plaisir coupable certaines scènes d’anthologie pour moi.

Vous connaissez certainement tous, l’histoire immortalisés au cinéma  (film de Joe Wright, 2005) et à la télévision (série de la BBC, 1995), je ne vais donc pas m’attarder dessus.

Beaucoup de choses ont été dites dessus, on est bien loin de la simple littérature sentimentale, même si c’est l’image qu’on a voulu en donner à l’époque (1813 : nous célébrons d’ailleurs cette année le bicentenaire d’Orgueil et Préjugé).

Ce roman pour « femmes » porte un regard acerbe sur la société de l’époque, tant sur la vie et les mœurs d’une petite communauté rurale, que sur la société plus noble mais tellement imbibée de mépris (et de bêtise !). Elle dénonce la rigidité d’une société qui l’a d’ailleurs empêchée de signer de son nom son roman : étant une « femme de la bonne société », elle ne pouvait revendiquer le statut d’écrivain. 

Les personnages secondaires sont délicieux : j’ai une petite préférence pour Mrs Bennet et ses nerfs, ses « pauvres nerfs » mis à dure épreuve tout au long du roman, ou pour Kitty, jeune fille volage qui ne comprend pas que ses actes ne sont pas sans conséquences sur le reste de sa famille. Et que dire de Mr Collin… Ah… Mr Collin, un roman à lui tout seul.

A chacune de mes lectures, je retrouve avec délectation Elisabeth Bennet et ses jugements hâtifs, et l’orgueilleux mais timide Mr Darcy, et évidemment, j’attends LA scène qui les rapprochera tous les deux.

Je relis cet ouvrage alors que je le connais par cœur, je suis presque capable de vous dire à quelle page tel personnage va dire cela. Que voulez-vous, Orgueil et Préjugé était l’enfant-chéri de Jane Austen, moi, c’est mon livre-chéri, et c’est d’ailleurs incroyable, mon cœur conserve intactes les sensations qu’il lui procure, il les attend d’ailleurs avec impatience, continue de se serrer, de pester, bref de battre au fil de l’évolution de ma lecture… 

Inévitablement, après avoir tourné la dernière page d’Orgueil et Préjugé, je regarde une nouvelle fois la série de la BBC avec Colin Firth, le seul et unique Mr Darcy pour moi…

mercredi 21 août 2013

El tiempo entre costuras / L’espionne de Tanger / le fil du destin (María Dueñas)




Trahie par l'homme qu'elle aimait, Sira, vingt ans, se retrouve seule à Tétouan. La guerre civile ravage l'Espagne et elle ne peut rejoindre sa mère à Madrid. Sans argent, sans amis, elle ne doit sa survie qu'à son seul talent : la couture. Comment peut-elle imaginer qu'en montant un atelier de confection elle se prépare à une existence d'aventurière ? Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, les riches expatriées retenues au Maroc par les hostilités affluent chez la jeune femme : elle seule sait recréer les derniers modèles de Paris. Sira conquiert ainsi ses entrées dans les plus grandes maisons, où se fomentent les alliances entre nazis et franquistes. Bientôt, elle est approchée par les services secrets britanniques. Pour eux, la couturière aux doigts d'or invente un très astucieux système de communication cryptée. Mais la guerre des espions n'est pas un jeu d'enfant. Envoyée à Tanger, à Madrid et à Lisbonne, Sira doit déjouer les pièges très sophistiqués d'ennemis aux manières policées, mais à la férocité bien réelle.

Lorsque je lis, comme tout le monde, j’aime voyager. Voyager dans des univers qui sortent tout droit de l’imagination de l’auteur, la Fantasy par exemple, voyager dans la psyché des personnages, ou voyager dans des mondes bien réels, différents de ceux que je côtoie au quotidien.

On a tous nos petits secrets. L’un des miens, -qui n’en sera plus un bientôt !-, est que je lis beaucoup en espagnol, ce qui m’offre un  monde impressionnant de lectures possibles en version originale. En France, l’on parle beaucoup de littérature anglo-saxonne, mais très peu de littérature en langue espagnole. Je suis même surprise de constater que finalement, vu la production, peu d’ouvrages espagnols ou latino-américains sont traduits. Il y a évidemment des monuments tels que Gabriel García Marquez (tout le monde a entendu parler de Cent ans de Solitude), éventuellement Luis Sepúlveda, ou des Bestsellers tels que L’ombre du vent de Carlos Ruiz Zafón (que je vous conseille d’ailleurs), mais une grande partie de ces ouvrages passent inaperçus. C’est vraiment dommage.

L’Espagne, dans son besoin de faire face au passé, connait depuis plusieurs années, un boom de la littérature abordant la Guerre Civile (1936-1939). Certains de ces ouvrages sont assez noirs, et d’autres, comme El Tiempo entre costuras (vous me pardonnerez de n’utiliser que le titre espagnol, mais les titres français, L’espionne de Tanger ou Le fil du destin sont vraiment peu représentatifs du roman à mes yeux, pas de grandes réussites...) se servent de cette période comme toile de fond, sans s’imbiber d’une lourdeur décourageante pour le lecteur avide de voyages.

El tiempo entre costuras nous transporte donc d’une Madrid en pleine guerre civile, au Protectorat espagnol, -Tanger la cosmopolite et Tetouan-.

Sira, une jeune coutière espagnole, se verra entraînée par le flot de l’histoire, et deviendra un agent spécial des Forces Alliées : elle finira par travailler pour les Anglais.

Présenté comme cela, vous allez penser qu’il s’agit avant tout d’un roman d’espionnage, et beaucoup d’entre vous vont tourner les talons. Attendez ! Non, ce n’est pas un roman d’espionnage, ni un roman d’amour d’ailleurs, ni un roman historique. De quoi s’agit-il alors ? D’un roman d’aventures, de l’épopée d’une femme, qui se bat pour survivre dans un contexte historique difficile, et avec une condition difficile, -celle d’être une femme dans une Espagne dans la tourmente-. Un roman profondément intimiste finalement, tant l’auteure s’est attachée à plonger au cœur de ses protagonistes. Malgré une narration à la première personne, elle nous dresse des portraits attachants des personnages secondaires, au langage parfois fleuri, mais tellement authentiques.

Ce livre m’a littéralement emportée, j’ai eu beaucoup de mal à le lâcher. Il a connu un grand succès en Espagne, mais ce n’est pas forcément un gage de qualité…Mais je dois dire que ce succès est mérité. Il s’agit de littérature sans prétention, de littérature d’évasion, mais l’auteure a fait preuve d’une grande rigueur en ce qui concerne les faits, les descriptions, et certains personnages historiques de l’époque. Tous ces éléments s’imbriquent naturellement dans la trame du récit, et nous livrent un contexte passionnant. Petite et grande Histoire se mélangent au gré d’une écriture fluide et agréable (j’espère que la traduction française sera à la hauteur de la version originale), conférant un rythme au récit qui m’a laissé peu de répit.

Pour ceux qui ne connaissent pas la littérature espagnole, voilà un bon roman pour terminer l’été !

PS: en France, ce roman est disponibles aux éditions Robert-Laffont (collection Bestseller), au format poche chez les éditions Point. Pour ces deux éditions, le titre est "L'Espionne de Tanger". Il me semble que vous pouvez le trouver aussi chez les Editions France-Loisirs, sous le titre "le Fil du destin".

samedi 17 août 2013

vendredi 16 août 2013

Nos gloires secrètes, (Tonino Benacquista)



Un meurtrier anonyme, un poète vengeur, un parfumeur amoureux, un antiquaire combattant, un enfant silencieux, un milliardaire misanthrope. Les personnages de ces six histoires ont un point commun : leur vie intérieure est bien plus exaltante que leur vie quotidienne. Et leur part d’ombre n’est rien en comparaison de leur part lumineuse. Une vérité que l’on tait, un exploit que l’on cache, un passé inavouable. Lequel d’entre nous ne garde pas, enfouie au plus profond, sa gloire secrète ?

Nous avons tous, enfouie au plus profond de notre être, une petite gloire secrète. Celle que l’on tait volontiers mais qu’on se remémore avec plaisir et ravissement.

Benacquista fait partie de ma liste d’auteurs dont j'achète les ouvrages dès leur sortie en librairie, sans même prendre le temps de lire le résumé. J’ai tellement aimé Malavita ou Sagas que je ne me pose pas de questions. C'est donc tout naturellement que je me suis ruée sur Nos gloires secrètes, puis que je l’ai posé dans ma PAL, attendant comme à mon habitude ce fameux bon moment. 

Le croyant arrivé j’ai sorti l’ouvrage de ma bibliothèque pour enfin l’observer (-j’ai une relation particulière avec mes livres et ma bibliothèque, régulièrement, je sors un livre, lis le résumé, le repose ou le change d’endroit, c’est toujours très tendre, et en fonction de l’édition, presque charnel. J’aime passer mon doigt sur la couverture des Gallimard ou des Editions de Minuit, sentir ce papier un peu rugueux. Mes livres et moi, c’est une véritable histoire d’amour). 

Et là, ce fut le choc : juste sous le titre, le paratexte m’indiquait « Nouvelles ». Moment de panique, je le repose… Ce n’est pas le bon moment, je dois me faire à l’idée. 

J’ai longtemps eu une sorte de dédain pour les nouvelles, estimant à tort que ce n’était que des ébauches de romans pour lesquels l’auteur n’avait pas eu matière à développer davantage. Vilain a priori n’est-ce pas ? Et surtout complètement idiot.

L’idée fait son chemin, c’est quand même du Benacquista. J’ouvre l’ouvrage, non sans une certaine crainte…

Je me plonge dans la première nouvelle, très perplexe, mais la plume de Benacquista, comme à son habitude, m’emprisonne dans sa toile, et ne me laisse pas repartir. Les pages défilent, j’arrive au bout de ce « Meurtre de la rue des Cascade », et la logique du recueil m’apparaît.

Ce que j’aime dans les Editions Gallimard, c’est que la sobriété de la couverture n’influence pas votre choix et ne révèle rien du contenu. Le titre doit être efficace, l’auteur aussi. En ouvrant l’ouvrage, je n’avais pas saisi tout le sens du titre de Nos gloires Secrètes. J’aurais pourtant dû me rappeler que chez Benacquista, il n’est pas le fait du hasard, il fait partie intégrante de l’ouvrage. 

Et me voilà prise au jeu de suivre ce fil conducteur et de chercher dans chacune des six nouvelles, LA gloire secrète du protagoniste, de tenter d’imaginer la chute, souvent déstabilisante, ce n’est pas du Benacquista pour rien. Je suivais maintenant ce fil d’Ariane, et inconsciemment, dans cette plongée de la psyché des personnages, je commençai à me livrer à une introspection de mon propre moi. Quelle est donc ma gloire secrète ? 

Le talent de Benacquista va au-delà de cette simple question, il réside indéniablement dans le fait que, malgré ce genre –la nouvelle- qui laisse peu d’espace pour dire les choses, ses mots sont toujours justes, et font toujours mouche pour s’immerger dans le Qui sommes-nous ? Quelle image renvoyons-nous aux autres ? Que savent-ils de nous, et comment nous comprennent-ils ? Qu’en est-il de ces indices que nous disséminons inconsciemment pour révéler ce que nous voulions garder caché ? 

C’est une véritable réflexion sur le genre humain qu’il nous livre, et je m’en suis délectée.

Et vous, y avez-vous réfléchi ? Quelle est votre gloire secrète ?