vendredi 16 août 2013

Nos gloires secrètes, (Tonino Benacquista)



Un meurtrier anonyme, un poète vengeur, un parfumeur amoureux, un antiquaire combattant, un enfant silencieux, un milliardaire misanthrope. Les personnages de ces six histoires ont un point commun : leur vie intérieure est bien plus exaltante que leur vie quotidienne. Et leur part d’ombre n’est rien en comparaison de leur part lumineuse. Une vérité que l’on tait, un exploit que l’on cache, un passé inavouable. Lequel d’entre nous ne garde pas, enfouie au plus profond, sa gloire secrète ?

Nous avons tous, enfouie au plus profond de notre être, une petite gloire secrète. Celle que l’on tait volontiers mais qu’on se remémore avec plaisir et ravissement.

Benacquista fait partie de ma liste d’auteurs dont j'achète les ouvrages dès leur sortie en librairie, sans même prendre le temps de lire le résumé. J’ai tellement aimé Malavita ou Sagas que je ne me pose pas de questions. C'est donc tout naturellement que je me suis ruée sur Nos gloires secrètes, puis que je l’ai posé dans ma PAL, attendant comme à mon habitude ce fameux bon moment. 

Le croyant arrivé j’ai sorti l’ouvrage de ma bibliothèque pour enfin l’observer (-j’ai une relation particulière avec mes livres et ma bibliothèque, régulièrement, je sors un livre, lis le résumé, le repose ou le change d’endroit, c’est toujours très tendre, et en fonction de l’édition, presque charnel. J’aime passer mon doigt sur la couverture des Gallimard ou des Editions de Minuit, sentir ce papier un peu rugueux. Mes livres et moi, c’est une véritable histoire d’amour). 

Et là, ce fut le choc : juste sous le titre, le paratexte m’indiquait « Nouvelles ». Moment de panique, je le repose… Ce n’est pas le bon moment, je dois me faire à l’idée. 

J’ai longtemps eu une sorte de dédain pour les nouvelles, estimant à tort que ce n’était que des ébauches de romans pour lesquels l’auteur n’avait pas eu matière à développer davantage. Vilain a priori n’est-ce pas ? Et surtout complètement idiot.

L’idée fait son chemin, c’est quand même du Benacquista. J’ouvre l’ouvrage, non sans une certaine crainte…

Je me plonge dans la première nouvelle, très perplexe, mais la plume de Benacquista, comme à son habitude, m’emprisonne dans sa toile, et ne me laisse pas repartir. Les pages défilent, j’arrive au bout de ce « Meurtre de la rue des Cascade », et la logique du recueil m’apparaît.

Ce que j’aime dans les Editions Gallimard, c’est que la sobriété de la couverture n’influence pas votre choix et ne révèle rien du contenu. Le titre doit être efficace, l’auteur aussi. En ouvrant l’ouvrage, je n’avais pas saisi tout le sens du titre de Nos gloires Secrètes. J’aurais pourtant dû me rappeler que chez Benacquista, il n’est pas le fait du hasard, il fait partie intégrante de l’ouvrage. 

Et me voilà prise au jeu de suivre ce fil conducteur et de chercher dans chacune des six nouvelles, LA gloire secrète du protagoniste, de tenter d’imaginer la chute, souvent déstabilisante, ce n’est pas du Benacquista pour rien. Je suivais maintenant ce fil d’Ariane, et inconsciemment, dans cette plongée de la psyché des personnages, je commençai à me livrer à une introspection de mon propre moi. Quelle est donc ma gloire secrète ? 

Le talent de Benacquista va au-delà de cette simple question, il réside indéniablement dans le fait que, malgré ce genre –la nouvelle- qui laisse peu d’espace pour dire les choses, ses mots sont toujours justes, et font toujours mouche pour s’immerger dans le Qui sommes-nous ? Quelle image renvoyons-nous aux autres ? Que savent-ils de nous, et comment nous comprennent-ils ? Qu’en est-il de ces indices que nous disséminons inconsciemment pour révéler ce que nous voulions garder caché ? 

C’est une véritable réflexion sur le genre humain qu’il nous livre, et je m’en suis délectée.

Et vous, y avez-vous réfléchi ? Quelle est votre gloire secrète ?

6 commentaires:

  1. Si tu devais me recommander un titre pour découvrir cet auteur, lequel serait-ce ?

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    1. Mon préféré reste Sagas. J'ai beaucoup de tendresse pour Malavita, mais j'ai dévoré Sagas qui porte un regard très acerbe sur notre société, avec l'humour de Benacquista en prime.

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  2. J'ai déjà lu de très bonnes critiques concernant cet auteur mais, comme Anne-Sophie, je ne l'ai pas encore lu...
    Et, hormis pour "Le Horla" de Maupassant que j'ai étudié à l'école, j'ai quelques réticences vis-à-vis des nouvelles. Malgré tout, ça n'empêche pas certains récits de valoir la peine ! C'est certain :)
    Quitte à découvrir cet auteur, je pensais commencer avec "Malavita". Mais si tu dis que "Saga" est encore meilleur, je me laisserai pitèt tenter ;)

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    1. Il faut lire le résumé des deux pour choisir, c'est un peu en fonction de ce qui vous intéressera / parlera le plus!
      Moi j'ai dévoré Sagas et beaucoup aimé Malavita (le "Encore Malavita" est d'ailleurs dans ma PAL et remonte tout doucement!), mais c'est vraiment une question de goûts...De plus, il ne faut pas avoir peur de lire du Benacquista, il a une plume qui emmène le lecteur...

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  3. Comme toi, le genre de la nouvelle de ne me séduit pas naturellement. A mon sens, c'est un exercice de style très particulier et très difficile : on ne peut délayer la médiocrité, on est obligé d'être percutant. Mais j'ai une certaine confiance en Tonino Benacquista, et peut-être me laisserai-je bientôt tenter par ce recueil ! Il y a longtemps j'ai lu "La Boîte noire et autres nouvelles" : je n'ai plus de souvenirs du contenu (honte à moi ! mais c'était il y a 10 ans...) mais je crois me souvenir que j'avais apprécié...

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    1. Ta définition de la nouvelle est très juste, il faut choisir, peser ses mots, c'est finalement un exercice de style très complexe.
      Benacquiste a une véritable identité littéraire, et j'ai bien fait de lui faire confiance. Je me souviens encore de ma lecture de cet été, remontant le fil d'Ariane qu'il a tendu tout au long de son recueil. C'est une vraie réussite...

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