lundi 29 février 2016

Proie Dunoir, Gaëlle K. Kempeneers

My name is Dunoir. Proie Dunoir. Laissez tomber : private joke. Qui je suis ? La nouvelle recrue du B.A.S., la banshee de service. On m’a engagée pour botter les culs des méchants qui hantent les rues de Rédemption. Sauf qu’entre les monstres mythiques, les divinités en goguette, les vampires crétins et les Puissances qui se bousculent au portillon, je ne sais plus où donner de la tête. Alors, quand en plus la Famille (la mienne, sinon ce ne serait pas drôle) s’en mêle, j’ai bien besoin de mes collègues Lucrèce et Leyhan pour y mettre un peu d’ordre. Sans oublier Jack, le loup. Mon âme-sœur, parait-il. Je vous ai déjà parlé de mon âme ? Y a moyen d’écrire tout un roman sur le sujet. Ah ! Mais attendez… Bref, y a des jours comme ça où on se dit qu’on aurait mieux fait de se casser la jambe au saut du lit !

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Résumé des Chroniques de la Liste-noire-des-livres-interdits.
Une sombre menace plane sur nos livres-chéris, sur ces ouvrages qui nous transportent jusqu'à pas d'heure dans la nuit et nous font rêver encore et encore dans la journée : les Dieux-de-tous-les-trucs-de-la-mer-et-de-la-terre les ont déclarés « dangereux pour l'humanité », et nous somment, nous, les humbles lecteurs, de les leur livrer. Voici l'histoire de notre rébellion! 
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Rappel de l'épisode précédent : Le Chat du Cheshire, dans une interprétation douteuse de l'une des prophéties, nous a entraînées dans une église, non loin du QG des livres-addicts Anonymes où sévit la Cerbère Rousse. Pour rejoindre Melliane qui s'est aventurée à l'intérieur, nous avons bravé l'obscurité pour tomber nez à nez avec...
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– Elle a plein de petites copines, constate Johanne.
Ça, c'est sûr. On est tombées en pleine surprise party de gargouilles. J'espère juste qu'on ne va pas servir d'apéritif.
– Elles ont des jolis yeux, fait observer Lupa comme si c'était un détail d'une importance capitale.
Leurs yeux verts émeraude luisent dans la noirceur de l'église et ils sont de plus en plus nombreux. Elles rassemblent leurs troupes.
– Bon, on fait quoi ? demande Melliane en se rapprochant de moi.
Le Chat est déjà en position de combat, mais ses mains tremblent légèrement. L'heure est grave, les mains du Chat ne tremblent jamais.
Instinctivement, nous reculons toutes d'un pas, comme si nous tentions d'instaurer une distance de sécurité entre elles et nous. 
Elles s'avancent de quelques centimètres. Au temps pour la distance de sécurité.
– J'aimerais vraiment avoir des super-pouvoirs... gémis-je.
– Moi aussi, un peu comme Superman! me souffle Bea.
– Ou comme Proie Dunoir... chuchote Roanne.
– Tu broies du noir ? Mais c'est normal, ne t'inquiète pas, on va s'en sortir... tente de la rassurer Lupa en lui tapotant le bras.
– Non, Proie Dunoir, c'est une banshee, expliqué-je.
– Vous croyez qu'elle a encore de la fièvre ? murmure Johanne.
Melliane me met la main sur le front et avant qu'elle n'ait le temps de dire quoi que ce soit, je poursuis:
– Proie Dunoir, c'est une banshee. Une vraie. Elle est morte et pouf, elle est revenue à la vie. 
– Moi je dis qu'elle a de la fièvre. On est mal les filles, parce que déjà qu'en temps normal son cerveau il est...
Le Chat fait un drôle de geste avec ses doigts à la hauteur de sa tempe avant d'ajouter :
– Mais si en plus elle a de la fièvre... Elle est capable de nous vendre aux gargouilles!
Roanne vient à ma rescousse.
– Non, non, pour une fois, elle a raison. Proie Dunoir est une banshee et elle a un cri qui est une véritable arme de destruction massive.
Je prends une longue inspiration, ferme les yeux, me concentre pendant une poignée de secondes et...
– Ahhhh, crié-je de toutes mes forces.
– Mais ça va pas la tête ! me hurlent les filles, les mains plaquées sur leurs oreilles.
J'ouvre les yeux. Bon, ça n'a pas eu l'effet escompté, mais au moins, les gargouilles ont reculé d'un bon mètre. C'est déjà ça. D'accord, elles n'ont pas explosé, leurs yeux brillent toujours autant et maintenant elles nous montrent leurs jolies dents bien pointues, mais, il faut toujours voir le positif pendant les moments de crise, on a de nouveau une vraie distance de sécurité.
– Il faut que tu meurs pour que ça fonctionne, m'explique Roanne.
– Je suis volontaire! Je peux aider à la tuer ! dit le Chat en levant la main.
Je lui jette un regard noir.
– Ben quoi, je veux juste rendre service, me répond-elle un sourire innocent sur les lèvres.
– Il y a quand même un problème avec Proie, continué-je en l'ignorant. Elle a la poisse. Mais la poisse avec un « P » majuscule, du style aimant à ennuis. Tout les trucs bizarres qui traînent, c'est pour elle. Un Wendigo ? Bingo. Une licorne qui n'aime que les jeunes vierges ? Re-bingo. Je suis sûre qu'elle serait capable d'attirer les gargouilles. À mon avis, c'est une question de karma.
– Un peu comme nous quoi... constate Bea en haussant les épaules.
– Ouaip, c'est ça! Mais quelle que soit la situation, elle garde un sens de l'humour génial ! Je n'ai pas arrêté de rire comme une idiote en essayant de ne pas faire trop de bruit parce que sinon, j'allais me faire remarquer au boulot.
– Et ce n'est pas du tout ton style ! ricane Melliane.
Je me tourne vers elle.
– Hey, mais je suis sûre que tu adorerais. Tout à fait le genre de bouquin que tu aimes. De l'action, de l'humour, une héroïne très attachante, des personnages originaux (il y a même une sirène!), une plume vraiment efficace, des épisodes courts...
– Ça a été conçu comme une sorte de feuilleton composé d'épisodes, et ce volume correspond à la première saison. Alors il s'en passe des choses! trépigne Roanne en effectuant quelques petits pas de danse.
Je crois qu'elle est fan de Proie Dunoir. Ça pourrait être un nouveau titre de roman : « Proie Dunoir, la banshee qui faisait danser Roanne au milieu des gargouilles ». Classe non?
Un énorme sourire étire mes lèvres et je m'autorise un déhanché des plus gracieux.
– Oh oui, il s'en passe des choses ! Il y a même Jack !
Roanne et moi gloussons bêtement.
– Je rêve, on est dans une église, entourées de gargouilles aux longues dents, et elles se tortillent et gloussent ! grommelle Johanne.
Je glousse de nouveau pour l'embêter et, comme je suis un tantinet taquine, je me prépare à glousser une troisième fois, mais un mouvement vers l'avant m'interrompt. Nos gentils nouveaux animaux de compagnie, qui ont été jusque-là un public très attentif, semblent avoir décidé de venir nous dire bonjour de plus près. Et je trouve leur sourire franchement effrayant. A mon avis, il ne doit pas y avoir de dentiste chez les gargouilles.
Le Chat s'est remis en position de combat, Bea a pris son sac et l'arme comme une massue, Johanne a attrapé le crucifix de l'autel, Lupa tente de les aveugler avec la lampe de son téléphone et Melliane a enlevé une de ses chaussures aux talons vertigineux.
– Si elles s'approchent trop, je leur crève un œil ! explique-elle.
Ah ouais... Mes copines, elles sont comme ça...
Elles nous encerclent maintenant. Leur souffle arrive jusqu'à nous. Elles ont vraiment mauvaise haleine, un petit check-up buccal ne serait pas du luxe.
J'ai un mauvais pressentiment.
Comme si c'était la fin. Notre fin.
On a déjà combattu les Dieux-de-tous-les-trucs-de-la-mer-et-de-la-terre, mais on s'en est sorties parce qu'on a fui. Notre efficacité repose sur l'infiltration, et là, l'infiltration a eu quelques ratés. 
J'ai vraiment un mauvais pressentiment.
On ne fait pas le poids.
Un peu de réconfort ne serait pas de refus. 
Avant de me lancer dans le combat, j'ouvre mon sac et en extirpe un pot de Nutella. Le dernier repas du condamné, de quoi prendre des forces.
– Quelqu'un en veut ? demandé-je

Pour la chronique de Roanne, c'est ici!

PS à l'attention de l'auteure: Vous avez voulu ma mort avec cette fin? ahhhh... Là, vous n'avez pas le choix, il va vite me falloir la saison deux, parce que, voyez-vous, j'ai déjà la fâcheuse tendance à me ronger les ongles, ce qui n'est pas très esthétique, vous devez en convenir, mais avec une fin pareille, vous avez sonné le glas du peu qui me restait... Et je pense que vous devriez faire une bonne action pour mes petits ongles malheureux en publiant très vite le 2... Oui, je sais, j'ai des arguments imparables.





dimanche 21 février 2016

Mala vida, Marc Fernandez

De nos jours en Espagne. La droite dure vient de remporter les élections après douze ans de pouvoir socialiste. Une majorité absolue pour les nostalgiques de Franco, dans un pays à la mémoire courte. Au milieu de ce renversement, une série de meurtre est perpétrée, de Madrid à Barcelone en passant par Valence. Les victimes : un homme politique, un notaire, un médecin, un banquier et une religieuse. Rien se semble apparemment relier ces crimes ... Sur fond de crise économique, mais aussi de retour à un certain ordre moral, un journaliste radio spécialisé en affaires criminelles, Diego Martin, tente de garder la tête hors de l'eau malgré la purge médiatique. Lorsqu'il s'intéresse au premier meurtre, il ne se doute pas que son enquête va le mener bien plus loins qu'un simple fait divers, au plus près d'un scandale national qui perdure depuis des années, celui dit des "bébés volés" de la dictature franquiste.

Fiction ou réalité ? Difficile de trancher pour ce roman. Fiction flirtant avec la réalité, c'est une évidence. En France, l'on sait finalement bien peu de choses de l'Espagne. Comme si le monde s'était arrêté à la Liga et aux duels Barça / Madrid, à la plage et à la crise économique qui dévaste le pays.

L'on se souvient vaguement d'une dictature qui s'est achevée avec la mort de Franco, mais cela ne va pas plus loin. Le passé est le passé, il n'a rien à voir avec le présent. Cruelle erreur que de penser cela. Un pays se construit sur son passé et l'Espagne n'en a pas fini avec le sien. La loi d'amnistie en est le principal frein. C'est ce que nous rappelle ce roman qui oscille entre roman noir, thriller et roman introspectif en nous offrant sous couvert de fiction, un roman assez proche de ce qui se passe en terres ibères.

L'AMP, un parti franquiste est au pouvoir, le spectre de la dictature et de ses méthodes pointe le bout de son nez, un sourire carnassier sur les lèvres. La presse est muselée, la justice est ficelée, mais la résistance s'organise. Diego, Ana, le juge David Ponce, chacun résiste avec les armes qui sont les siennes, jusqu'à ce qu'Isabel croise leur route.

Avec elle, un scandale éclate, et pas des moindres : celui des enfants volés pendant la dictature. Mais tout cela s'est produit en Argentine et au Chili, pas en Espagne, ce n'est pas possible dans un pays comme l'Espagne, peut-on lire. Comme si l'Espagne était au-dessus de cela, comme si la dictature de Franco n'avait pas été aussi effroyable que celle de Videla ou Pinochet, comme s'il n'y avait pas des gens « bien » impliqués dans le négoce de ces 30 000 enfants volés.

Commence une course contre la montre contre la police, la justice, le contrôle des médias pour faire éclater la vérité. Et au milieu de tout cela, des assassinats. Quel est le lien ?

C'est avec une certaine fascination que j'ai suivi ce récit aux reflets cinématographiques. La connaissance de l'Espagne contemporaine de l'auteur m'a bluffée, certains risques aussi dans cette dénonciation qu'il fait des évènements. Son analyse sur la raison de ces vols d'enfants est criante de pertinence. Je n'ai pas pu m'empêcher au fil des pages de faire des parallèles avec des éléments récents de l'histoire de l'Espagne. Les bébés volés ont bel et bien existé, le franquisme est toujours là, il vit sous un vernis démocratique, l'Opus Dei n'a pas disparu et continue de tirer certaines ficelles, l'on se débarrasse toujours de juges gênants (le juge Garzón en est un excellent exemple) et l'on a beaucoup de mal à se réconcilier avec son passé.

L'on pourra reprocher une intrigue parfois trop facile, des moments d'introspection qui font retomber par moment la tension narrative, mais j'ai vraiment, vraiment savouré ce roman. J'ai refermé la dernière page en me disant que ça serait bien qu'il franchisse la frontière et ravive un peu les mémoires sur ce que l'on veut oublier là-bas. Après tout, c'est aussi l'un des rôles de la littérature.


vendredi 19 février 2016

Jeu d'indulgence, Jennifer L. Armentrout

A 21 ans, Calla, ex-reine des concours de beauté, porte les cicatrices d'une tragédie qu'elle préfère taire... De profondes blessures qu'elle sait dissimuler mieux que personne, notamment à son cercle d'amis le plus proche. Or, lorsqu'elle apprend que sa mère s'est volatilisée avec ses économies, le vernis menace de s'écailler. De retour dans sa ville natale, la jeune femme a la surprise de découvrir un certain Jax derrière le bar que tient habituellement sa mère. Dès lors, ce dernier s'impliquera corps et âme dans la quête de Calla. Reste à savoir s'il sera capable de la percer à jour...

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Résumé des Chroniques de la Liste-noire-des-livres-interdits.
Une sombre menace plane sur nos livres-chéris, sur ces ouvrages qui nous transportent jusqu'à pas d'heure dans la nuit et nous font rêver encore et encore dans la journée : les Dieux-de-tous-les-trucs-de-la-mer-et-de-la-terre les ont déclarés « dangereux pour l'humanité », et nous somment, nous, les humbles lecteurs, de les leur livrer. Voici l'histoire de notre rébellion! 
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Rappel de l'épisode précédent : Le Chat du Cheshire, dans une interprétation douteuse de l'une des prophéties, nous a entraînées dans une église, non loin du QG des livres-addicts Anonymes où sévit la Cerbère Rousse. Pour rejoindre Melliane qui s'est aventurée à l'intérieur, nous avons bravé l'obscurité. A l'intérieur, des bruits étranges nous entourent.
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Le bruit retentit une deuxième fois. Boum, clac, boum, clac. Ça n'est pas le bruit du traîneau du Père Noël, ni des chameaux des Rois Mages...
Lupa se retourne brusquement et éclaire avec la lampe de son téléphone le côté de l'église. Le confessionnal se tient là, à quelques mètres.
– Vous croyez qu'on tient toutes dedans ? murmure Roanne.
– En s'entassant un peu, ça devrait le faire, acquiesce Johanne.
Je suis sur le point de leur dire que l'idée est séduisante quand je vois Melliane qui se dirige vers la nef. Elle a décidé de la jouer Kamikase. Justement aujourd'hui. Il n'y a pas que moi qui aie le cerveau enrhumé.
– Euh, Melliane, l'appelé-je doucement. Tu vas où ?
– J'ai vu un truc là, tout à l'heure. Ça bougeait.
– Ça bougeait et elle va voir ! soupire Bea en levant les yeux aux ciel. Livre-vie, sors du corps de Melliane ! ajoute-t-elle.
– Eh, oh ! Je n'y suis pour rien moi ! protesté-je.
Elle continue de s'avancer, Le Chat du Cheshire sur ses talons, en position de défense.
– Lupa, amène ton téléphone ! ordonne cette dernière.
Bon, quand faut y aller, faut y aller !
– J'aimais bien l'idée du confessionnal, bougonne Roanne.
Moi aussi et c'est bien la première fois...
En file indienne, nous nous approchons de l'autel. Melliane et Le Chat sont déjà en train de l'observer.
– S'il y a un passage, il doit être ici, réfléchit le Chat.
– Et on doit pouvoir l'ouvrir en appuyant sur un truc, surenchérit Melliane en tâtant la pierre de l'autel.
Bea retient sa respiration à côté de moi.
– Mais qu'est-ce que je fais la ? l'entends-je dire.
Je me le demande aussi, je serai mieux sous ma couette, avec un bon bouquin. En plus il fait froid, et je suis enrhumée. Tiens, ça me rappelle que j'ai envie d'éternuer. J'éternue.
– Chut! se retournent vivement les filles. Tu vas nous faire repérer!
Facile à dire, on ne contrôle pas les éternuements !
– Bon, je crois qu'il n'y a rien ici, constate Johanne avec une pointe de soulagement dans la voix.
Luna fait une dernière fois le tour de l'autel en appuyant un peu partout. Rien, il ne se passe rien. Pas de passage secret, pas de bibliothèque enfouie.
Je suis déçue.
– Les filles, j'ai l'impression qu'on nous observe, chuchote Bea.
– Meuh non, meuh, répond le Chat en regardant malgré tout derrière son épaule.
Elle n'est pas tranquille, et quand le Chat n'est pas tranquille, ça veut dire énormes problèmes à l'horizon.
– Euh, les filles, si on allait se le prendre ce café ? propose Bea.
Je hoche de ta tête frénétiquement en oubliant qu'avec l'obscurité, elles ne peuvent pas me voir.
Boum, clac, Boum, clac
On se retourne toutes en même temps. Le bruit ne vient pas du même endroit qu'avant.
– Il y a quelqu'un, murmuré-je.
Bon, d'accord, je viens d'énoncer à voix haute une une évidence...
– Oui, réplique simplement le Chat.
Elle s'est mise en position défensive.
– Les filles, il nous faudrait vraiment une armée ! Soufflé-je. Ça serait quand même pratique !
– Je t'ai proposé un ratel et une armée d'araignée et tu as dit non ! ironise Le chat.
– J'ai dit oui pour le ratel, mais c'est difficile à trouver ! Ça ne court pas les rues ! Et on ne peut pas mettre une petite annonce qui dirait « Recherche un ratel pour faire partie de notre équipe contre les Dieux-de-tous-les-trucs-de-la-mer-et-de-la-terre ! »...
– Euh, pour les araignées il faut un vote, hein... proteste Johanne la voix tremblante.
– Ou alors, il nous faut un Jax ! m'exclamé-je un peu trop enthousiaste vu la situation.
– Un Jax ? demande Roanne.
J'imagine parfaitement ses sourcils interrogateurs.
– Ben oui, Jax, c'est l'homme parfait. Adorable, aimant et un super guerrier ! Il est top de chez top ! Tout comme ce nouveau roman de Jennifer L. Armentrout ! Des personnages un peu cabossés, des doutes, de la reconstruction, de l'action et de l'amûuuur...
Je me suis peut-être un peu laissée emporter en disant ça, mais je ne peux retenir un long soupir niais.
– Ça y est, elle divague... ronchonne Lupa.
Boum, clac, Boum, clac.
Je ne tiens pas compte du bruit.
– Calla est vraiment toute mignonne avec ses doutes et elle a un sacré humour ! Parce la Brigade des Beaux Gosses... ahhhh, je suis sûre qu'ils feraient une super armée !
– Tu passerais tout ton temps à te rincer l'oeil, ricane Roanne.
– Mais non, pas du tout...
Enfin, sans doute un peu. Même beaucoup.
– Comme d'habitude, l'histoire est prenante, bien écrite, bref, une bonne petite romance bien addictive. Et on retrouve Cam et Avery, et Jase et Teresa des tomes 1 et 2.
Je glousse. En plein milieu d'une église. Dans le noir. Entourée de bruits bizarres.
– Ça y est, le cerveau est atteint ! théâtralise le Chat.
Ouais... Elle a sans doute un peu raison.
– Et Jax, c'est un Cam 2.0, sauf qu'un peu plus dangereux. Je suis sûre qu'il saurait quoi faire dans...
Boum.
Le bruit est plus sec plus fort surtout.
– Les filles, ça a bougé là-bas... dit Lupa.
Clac, clac, cric, cric
– Ça a l'air tout petit, se rassure Bea.
– Un ratel aussi s'est petit et c'est une arme de destruction massive ! nous rappelle Le Chat.
Elle a raison. C'est quoi l'adage : « Plus c'est petit, plus c'est mignon ? ». Le crétin qui a dit ça n'avait certainement jamais vu de ratel. Ni d'araignées venimeuses. Ni de... gargouille.
Ma mâchoire tombe jusqu'à toucher les dalles froides de l'église. Du moins c'est l'impression que j'en ai. Un rapide coup d'oeil aux filles me montrent qu'elles vivent le même phénomème que moi. Devant nous, à quelques mètres, se trouve une gargouille. Et elle bouge. Et mon rhume doit avoir atteint mon cerveau, parce que, voir une gargouille bouger, ce n'est pas possible. Et il doit être contagieux parce que, visiblement, les filles ont les mêmes visions que moi.
– Elle a les yeux verts, remarque Bea, comme si c'était le plus étonnant.
– Et ils luisent dans la nuit, complète Lupa
– Et elle a plein de petites copines... chuchoté-je.




lundi 15 février 2016

Le silence des bombes, Jason Hewitt

Juillet 1940. La petite Lydia, 11 ans, traverse un village du Suffolk. Elle porte un masque à gaz. Les magasins sont fermés, les maisons vides, les fenêtres condamnées. Lydia coupe à travers champs et arrive bientôt devant une grande demeure. C'est là qu'elle a grandi. La fillette espère y retrouver sa famille, mais la maison est déserte. Plus tard, dans la nuit, un soldat portant un fusil et un uniforme anglais pénètre dans la maison. Avec un étrange accent, il lui explique qu'il ne lui fera pas de mal, mais qu'elle ne doit pas quitter les lieux et qu'elle doit obéir à certaines règles... Dit-il la vérité ? Que cherche-t-il ? Pourquoi lui semble-t-il aussi familier ? Et surtout, comment connaît-il le nom de Lydia ?

J'aime beaucoup les romans qui ont trait à la Seconde Guerre Mondiale, et la mémoire est une petite chose étrange, mais je me souvenais parfaitement d'une chronique du Chat du Cheshire sur ce roman. Quand il a croisé ma route, je me suis lancée. Et je n'ai aucun regret.

Les bombes de la guerre explosent dans toute l'Europe, partout. Aucun pays n'est épargné. Même l'Angleterre qui craint une invasion allemande et a préparé la population à réagir en tant qu'attaque. Les enfants sont envoyées en zone protégée, certains villages sont désertés. L'exode de la peur est là. La guerre est loin mais si proche. Lydia a 11 ans, et revient chez elle. Mais elle a la mauvaise surprise de découvrir que les lieux sont vides. Il n'y a ni famille, ni voisin. Personne. Plus personne. Comment faire quand on n'a que 11 ans ? Sa mère va forcément revenir, il ne peut en être autrement... Il faut juste attendre.

La guerre n'a pas simplement dévasté les pays qui ont été envahis. Elle a aussi frappé de plein fouet les allemands. Le soldat en est un bon exemple. Musicien amoureux avant la guerre, il devient cet être qui tente de survivre comme il peut dans le tumulte du conflit.

Le récit est lent, oppressant, l'horreur n'a pas besoin de sang. Ce huis-clos se révèle au fil des pages et l'humanité naît de l'inhumain. L'insertion de flash-back donne un vrai souffle au soldat, qui est hanté par sa conscience. Il a tout perdu, il veut vivre, tenter de se reconstruire. Mais il refuse de commettre l’innommable, et le contact avec Lydia va lui montrer que rien n'est simple dans ce monde.

L'auteur a parfaitement su retranscrire les émotions de cette petite fille seule, désoeuvrée, qui comprend vite que sa survie dépend du bon vouloir de cet homme. Ses réflexions sur le monde, sur cette guerre qu'elle ne comprend pas jalonnent ce roman, tout comme celles du soldat. Ces deux personnages s'animent, se construisent au fil des pages. Les pièces du récit d'imbriquent petit à petit pour nous emmener dans une direction que je n'avais pas forcément prévue.


Ai-je aimé ce roman ? Oui, c'est indéniable. La lenteur du récit a parfaitement servi l'histoire, la noirceur a insufflé un vent d'émotions dans mon cœur. Ce sont des pages difficiles, mais empreintes d'une émotion lourde. 

J'ai vraiment apprécié. 

vendredi 12 février 2016

La Fosse aux louves, Bertrand Carette

Mordante, espiègle, intelligente : telle est Virginie, mère célibataire convoitée, qui vit entourée de ses chevaux dans son vaste domaine de la Brenne. Elle est bientôt victime d'un complot ourdi par son oncle Antoine, un bon à rien. Coups bas, mensonges, accusation de meurtre et de captation d'héritage sont autant de stratagèmes pour tenter de spolier la jeune femme d'une propriété de plus de six cents cinquante hectares, avec fermes et étangs. Seule échappatoire possible pour Virginie dont le coeur, enfin, chavire : Tristan, concertiste international renommé… et plus âgé qu'elle. Or Virginie n'ose pas faire éclater au grand jour ses sentiments… Jusqu'à ce qu'elle apprenne, in extremis, la vérité sur les liens qui l'unissent à Tristan.

Il fut une époque où je lisais beaucoup de romans de terroir. Ma mère aimait cela, j'aimais cela, alors nous nous plongions les yeux fermés dans ces récits qui faisaient vivre nos belles régions de France. Parfois d'ailleurs, quand je jette un coup d'oeil aux étagères de ma bibliothèque, je ne peux éviter un sourire ému en voyant certains titres. Mais voilà, ma mère n'est plus, et je n'ai plus lu de romans de terroir.

Jusqu'à ce que la Masse Critique Babelio et les Presses de la Cité ne me proposent la Fosse aux louves. Le résumé est alléchant, la région -la Brenne- me rappelle des souvenirs, je suis partante et j'attends avec impatience la réception de ce roman. J'avais, en renouant avec ce genre, la sensation de renouer un peu avec ma mère. Las, à l'arrivée, n'en ressort que de la déception.

Le premier obstacle a été de repérer qui était qui dans les personnages. Ils sont nombreux et pas assez développés, pour ne pas dire caricaturaux parfois. Je suis ensuite passée par l'étape des soupirs et des yeux vers le ciel. Tout est très stéréotypé dans cette reprise des schémas d'une saga familiale : la famille aisée, la lutte de pouvoir, les gentils, les méchants, l'amour. Je fais partie des lecteurs qui ne sont pas gênés par les stéréotypes si ceux-ci sont bien employés et fonctionnent. Mais là, clairement, la sauce n'a pas pris. Sans aucun doute parce l'écriture ne donne pas de souffle à ce récit trop plat.

Ne reste que la Brenne, qui malgré mes critiques, vit dans ces pages. Et ça, c'était quand même agréable.

mercredi 10 février 2016

Trust in me (Jeu de patience, tome 1.5), Jennifer L. Armentrout

Cameron Hamilton a l'habitude d'obtenir tout ce qu'il désire, surtout lorsque cela concerne les femmes. Mais quand Avery Morgansten débarque dans sa vie, il rencontre la première personne résistant à ses beaux yeux bleus. Mais Cam n'est pas prêt à abandonner la partie. Il n'arrive pas à sortir cette fille de ses pensées.

Avery a ses secrets, des secrets qui l'empêchent d'admettre les sentiments qu'elle ressent pour Cam. Sa persistance (et ses délicieux cookies) briseront-ils ses barrières et gagnera-t-il sa confiance ? Ou bien perdra-t-il sa première véritable chance d'un amour fait pour durer ?

(Traduction empruntée au site http://www.boulevarddespassions.com que je ne peux que vous conseiller!)

Nous portons tous un « gloussomètre », « un soupiromètre » et un « larmomètre » en nous. Oui, tous. Je vois déjà vos regards perplexes, voire inquiets. Mais de quoi elle parle ? D'un virus incurable ? D'une bactérie mangeuse de cerveaux (le mien va très bien, mais merci de vous en inquiéter!) D'esprits qui prennent possession de nos corps ? Non, non, rien de tout cela. Promis.

(Le Chat, je te vois venir : Je suis saine d'esprit, je t'assure. Je n'ai pas été piquée par une araignée qui aurait détraqué mon équilibre et je ne suis pas un ratel réincarné !)

Bon, tout cela ne résout pas notre problème. De quoi s'agit-t-il ?

Un gloussomètre, un soupiromètre, un larmomètre sont des petits phénomènes internes, que nous avons donc tous en nous, qui permettent de mesurer nos gloussements, soupirs et larmes pendant une lecture. En quoi sont-ils importants ? Pour certaines lectures, ils sont un excellent indicateur de la qualité du récit et ils sont très utiles pour les romances.

Maintenant, vous voyez de quoi je parle, non ? Vous savez, ces gloussements qui nous échappent alors qu'on est dans le métro et qui flanquent des torticolis à nos voisins qui essayent de lire le titre du roman qui nous met dans de tels états (« parce que ça a l'air vraiment bien! »), roman dont on aura veillé au préalable à cacher la couverture parce que euh... Elles sont parfois vraiment too much... (D'ailleurs celle-ci n'est pas des plus réussies...) Sans parler de ces soupirs que l'on retient jusqu'à en attraper des points de côtés parce qu'ils ne sont pas des plus flatteurs en public (« mais il lui arrive quoi à la dame? » Gênant... très gênant...) Et que dire de ces larmes que l'on déverse à torrents dans la salle d'attente du dentiste, et qui, en plus de nous donner un air franchement pathétique (le nez irrité et les yeux rouges, il y a plus sexy...), effraie les patients car ils se disent que c'est le très-méchant-dentiste qui nous met dans un tel état (et là, ce n'est pas de la compassion pour nous, ils ont très peur pour leur dentition à eux, du genre : « mais il fait si mal que ça ? »).

Ah, ça y est... Je vois à la lueur dans vos yeux que nous nous comprenons. Bon, donc on a tous un « gloussomètre », un « soupiromètre » et un « larmomètre » en nous. Ils ne fonctionnent pas toujours ensemble d'ailleurs, ils sont indépendants, mais collaborent parfois.

Eh bien, mon « gloussomètre » a relevé des scores plus hauts que l'Everest pendant cette lecture. Bien plus hauts. J'en ai explosé le plafond du ciel. Et mon « soupiromètre » ? Pas compliqué, rien que de savoir que Cam allait être le narrateur de ce roman... pfiou.. il était déjà tout fébrile. Et pourtant, je n'aime pas savoir ce que pensent les héros en général. Être dans la tête d'un homme, ce n'est pas pour moi. Mais Cam ? C'est l'homme parfait... (Tiens, mon « soupiromètre » vient de s'activer.)

Evidemment, dans ce récit, pas vraiment de surprises étant donné que nous est relatée l'histoire de Cam et d'Avery, mais selon le point de vue de Cam. (Gloussomètre qui s'agite). Pas de surprises donc, mais un ensemble toujours aussi mignon, avec une Avery touchante et un Cam exceptionnel (Soupiromètre). On suit Cam dans son cheminement vers Avery, ses interrogations, ses doutes, ses failles aussi, on le découvre avec ses amis, sa famille... Et ...(soupiromètre + gloussomètre)

L'écriture de Jennifer L. Armentrout est toujours aussi fluide, les personnages vraiment bien dessinés, et l'auteure évite tous les écueils d'une vulgarité qui m'aurait fait sauter des pages (j'aurais d'ailleurs bien aimé qu'il y ait plus de pages...), et si mon « larmomètre » ne s'est pas emballé (enfin, heureusement pour moi d'ailleurs, parce que glousser, soupirer et pleurer en même temps, ça aurait fait beaucoup pour une seule nuit. Comment ? Non, je ne viens pas d'avouer l'avoir lu en quelques heures simplement. Pas du tout. J'ai éteint très tôt. A deux heures du matin. C'est tôt non ?), mon gloussomètre et mon soupiromètre on fait la java. Ils étaient déchaînés. Ils ont adoré en savoir plus sur Cam, découvrir certaines facettes de sa personnalité (eh, oh, gloussomètre, on se calme !), comment il voit Avery qui n'en est que plus émouvante.

Bon, vous l'avez compris je crois, dire que je suis accro à ce petit couple est un euphémisme.


(Et pour Melliane : je l'ai lu en espagnol, et pas en anglais... Non, non, je n'ai pas encore sombré du côté obscur de la force!)

lundi 8 février 2016

Le goût du large, Nicolas Delesalle

"Le temps : tout était là, dans ces cinq lettres, cette simple syllabe. J'allais soudain en être riche, ne plus courir après, le nez rivé sur l'ordinateur, le téléphone. Pendant neuf jours, j'allais devenir un milliardaire du temps, plonger mes mains dans des coffres bourrés de secondes, me parer de bijoux ciselés dans des minutes pures, vierges de tout objectif, de toute attente, de toute angoisse. J'allais me gaver d'heures vides, creuses, la grande bouffe, la vacance, entre ciel et mer."

De l'inaccessible Tombouctou à la mélancolique Tallinn, entre une partie d'échecs fatale quelque part dans un hôtel russe et un barbecue incongru à Kaboul, des clameurs de la place Tahrir au fond d'un trou, dans l'Aveyron... C'est le roman d'une vie et de notre monde que raconte Nicolas Delesalle, le temps d'une croisière en cargo.

En général, lorsqu'on songe à une croisière, ce n'est pas l'image du cargo replet de conteneurs qui nous vient à l'esprit. Non, ce serait plutôt le paquebot grand luxe avec sa piscine sur le pont, ses joyeux animateurs et son brouhaha étourdissant. Pas l'idéal pour nous retrouver face à notre reflet, pour prendre le temps de la réflexion. Il ne me serait d'ailleurs jamais venu à l'idée de partir en voyage sur un cargo, cruelle erreur de ma part, parce que ce type de périple me conviendrait bien plus qu'une croisière classique. Avoir le luxe de voir défiler les secondes, le luxe de pouvoir se remémorer, le luxe de savourer les choses infimes, les rencontres, tout ce que le tumulte de la vie ne permet pas. 

J'ai donc embarqué avec Nicolas Delesalle sur le cargo MSC Cordoba, « petit » porte conteneurs de juste 1269 boîtes hermétiquement fermées dont l'équipage bigarré ignore tout du contenu. Sa mission, amener sa cargaison à bon port, vivre la mer, la cohabitation avec les diverses nationalités et attendre avant de rentrer chez soi. Rien de plus. Mais tout cela malgré tout.

Au gré des flots, de ces voix qui s'élèvent sur le pont, dans la soute, de ces échanges avec des personnalités improbables, l'auteur va plonger dans son propre esprit pour ouvrir les conteneurs de sa mémoire.

L'image est belle, et ô combien vraie. Et c'est ainsi que, suivant le fil de ces boîtes que l'on ouvre, Nicolas Delesalle nous entraîne, dans ces courts récits qui ressemblent à des nouvelles, dans son vécu de journaliste. La plume est sûre, le mot est juste et l'émotion omniprésente. 

Armé d'un humour qui évite tout pathos, l'auteur se remémore tantôt certains aspects marquants de son expérience, tantôt des anecdotes qui lui ont été racontées. Le regard est lucide sur les drames humanitaires, politiques qui l'ont envoyé fouler de sol de la Côte d'Ivoire, de l'Ukraine ou de la Syrie et laisse au lecteur entrevoir ce qu'il veut y voir. Je suis convaincue que ce que j'ai entraperçu pendant la partie d'échecs ne sera pas la même chose que ce qu'aura vu un autre lecteur. Et nos deux lectures seront complémentaires, tout simplement parce qu'elles seront portées par les émotions ressenties.

Ce n'est pas un pamphlet politisé, un de plus, qui s'offusquerait de la pauvreté ou de la violence. C'est le regard d'un homme, profondément humain, qui se rend compte qu'il n'est que bien peu de choses face à un monde en branle, où la politique, le journalisme si rapide avec les nouvelles technologies, oublient parfois que derrière les drames, ils y a des hommes que la misère frappe de plein fouet.

J'avais déjà eu un aperçu du talent de Nicolas Delesalle dans Un parfum d'herbe coupée que j'avais adoré, et ce talent se confirme après cette lecture. J'ai suivi le fil d'Ariane des conteneurs avec un plaisir infini, chaque chapitre refermé en appelait un autre, différent, mais tout aussi intimiste. Les mots sont simples, sans fioriture, mais font mouche.

C'est décidément un auteur que je vais suivre...